Que vouliez-vous que je fasse ? Je ne pouvais pas aller avec Thorin et sa compagnie reprendre Erebor, ce n'était décemment pas la place d'une femme. Alors je tâchais de m'occuper comme je le pouvais. Je soignais mes rapaces, confectionnais quelques vêtements... Tout en priant pour que leur expédition se passe sans trop de mal. Bien évidemment, j'ai entendu parler des ravages causés par Smaug dans sa fureur, et j'en étais navrée pour les Hobbits. Mais encore une fois, je n'y pouvais pas grand chose...
   

   Des Araignées, non. Et je n'y compte pas ! Que ces horreurs restent loin de moi, et je me porterai à merveille. Les récits qu'on m'en a fait suffisent amplement, je n'ai aucune envie de les voir de mes propres yeux... Quant aux Orcs... Ils ont assassiné mes parents, alors oui, je peux affirmer sans mentir que j'en ai fait les frais. Je n'ai jamais eu l'occasion d'en affronter un moi-même, et bien que je ne puisse pas affirmer avec certitude quel comportement je pourrais avoir en face de ces immondes créatures, je peux en revanche vous assurer qu'il n'aurait absolument rien d'amical.
   

   Alors là... Un mystère presque total pour moi. Croyez-bien que ça ne m'enchante pas de me retrouver dans l'ignorance, mais je n'ai pas accès à des sources d'informations sûres et précises sur ce fameux Nécromancien. Malgré tout, je garde l'intime conviction qu'il fera bientôt parler de lui.
   

Prenons les choses dès le début, voulez-vous ? Mon père se nommait Tharor, et était un honorable guerrier maniant la hache de guerre comme personne, mais aussi un forgeron assez doué dans son art. Né et élevé à Erebor, au sein d'une famille au sang noble, son caractère difficile faisait de lui un fier représentant de la race Naine. Ayant la bougeotte lors de ses jeunes années, il finit par rencontrer Darîs, la jeune femme qui devint son épouse quelques années plus tard. Cette dernière n'hésita pas une seule seconde lorsque son mari lui demanda de venir vivre auprès de lui, et quitta les Monts de Fer pour venir habiter Erebor.

Malheureusement pour eux, les années de bonheur et de quiétude furent de courte durée. Du Nord vint Smaug le Doré, et avec lui, l'exil. Le rude exil qui jeta le peuple d'Erebor, démuni et abattu, dans le vaste monde. Désormais sans royaume, il erra longtemps... Et c'est durant ces vagabondages hasardeux que je vins au monde. Bien qu'ils avaient rêvé d'un meilleur avenir pour moi, mes parents furent tout de même ravi de me voir pointer le bout de mon nez. Mes premières années furent insouciantes, comme celles de n'importe quel enfant. Cependant, mes géniteurs prirent rapidement la décision de me confier à un couple d'amis, afin que j'apprenne le métier de fauconnier et de couturière. Bien qu'aimant profondément ma famille, mon caractère indépendant et curieux me permit de m'adapter rapidement, et même si je ne les voyais plus qu'en de rares occasions, j'adorais ce que je faisais.
Lorsque j'eus environ dix ans, mes parents m'annoncèrent que j'avais une petite soeur. Une adorable fillette aussi rousse que notre père, mais qui avait les prunelles bleu-vert de notre mère. Elle se nommait Tharîs. Attendrie par ces belles joues roses et ce sourire parfaitement adorable, je ne l'aimai profondément dans la seconde, et passai beaucoup de temps à chanter pour elle. Dès l'instant où mes yeux se posèrent sur elle, je sus que j'aurais fait n'importe quoi pour la protéger. Une tâche dans laquelle j'échouai...

Une fois repartie vers ma famille adoptive -car au fil du temps, mes professeurs étaient devenus de seconds parents- le village où s'étaient établis mes parents fut ravagé par les Orcs. On ne retrouva jamais le corps de ma soeur. J'ignore aujourd'hui encore si elle périt ce jour-là aux côtés de nos parents, mais j'aime à penser qu'elle est belle et bien en vie, quelque part. Et croyez-moi, je la retrouverai, quoi qu'il puisse m'en coûter. Le décès de mes parents me porta un rude coup, évidemment. Mais je me rappelai de ce que me disait sans cesse ma mère. Sois forte, ma fille. Les femmes Naines doivent être fortes, alors tu devras l'être aussi. Aujourd'hui encore je me souviens de ces paroles, et m'efforce de m'y conformer.

Le temps passa, et la vie dans les Ered Luin me paraissait tranquille. A présent adulte, je gérais mes propres rapaces, peu au début afin de m'habituer et de faire les choses correctement. Je confectionnais également quelques vêtements, histoire de varier mes activités. Je n'ai pas grand chose d'intéressant à raconter sur cette période de ma vie. Eh, je ne suis pas une grande aventurière voyageant par monts et par vaux, moi ! Et puis quel intérêt, je vous le demande ! Non non, j'étais bien plus utile dans mes montagnes.

Vous voulez que je sois honnête ? Je n'aurais jamais cru pouvoir fouler un jour le sol d'Erebor. Et pourtant... ! C'est là que je vis aujourd'hui, comme l'avait toujours souhaité mon père. Les descriptions qu'il me faisait de ces halls étaient bien en dessous de la vérité... Je suis fière d'être une habitante du royaume niché au coeur de la Montagne Solitaire, et je compte bien faire honneur à mes défunts parents. Et à quel point je peux être reconnaissante à Thorin et sa compagnie d'avoir pu rendre cela possible...